Instrumentation de la serre communautaire de Kuujjuaq

Pour reprendre les propos de Pierre-Jules Stahl, « La science se compose d’une suite d’observations » (Les pensées et réflexions diverses, 1841). Ainsi, pour comprendre la culture sous serre à Kuujjuaq, il faut en premier lieu observer et mesurer.

Dans le cadre des projets SEQINEQ successifs, nous avons donc entrepris de réaliser différentes mesures pour tenter de comprendre le comportement thermique de la serre communautaire.

Les contraintes

Nous avions quelques contraintes, qui nous étaient imposées ou que nous nous sommes imposées.

Parmi les contraintes imposées, nous avions le climat extrême [source] avec des températures mesurées entre 31,5 et -41,9°C ! Cela impose de prendre quelques précautions pour protéger l’électronique ! Ensuite, nous devions tenir compte de possibles coupures d’alimentation électrique et de connexion Internet. En effet, nous ne voulions pas perdre d’informations !

Les contraintes que nous nous imposions concernaient principalement les mesures à réaliser et la transmission en quasi-temps réel vers notre laboratoire palois. Pour les mesures, nous voulions les classiques températures et hygrométries à l’extérieur et dans la serre. Nous voulions également mesurer la ressource solaire disponible ainsi que la température du sol de la serre. Enfin, nous souhaitions une photographie quotidienne de l’intérieur de la serre afin de pouvoir suivre la croissance des végétaux.

Nous voulions également une solution (relativement) simple, peu onéreuse, et basée sur des solutions libres de droits afin de permettre sa diffusion dans la communauté.

Le tout devait être imaginé, construit et testé de l’autre côté de l’Atlantique. Nous devions être sûrs de notre réalisation, car toute maintenance à distance allait être problématique et nécessiterait de solliciter une intervention humaine ! Sans compter le fait de prendre l’avion et donc de passer les contrôles de sécurité avec le prototype que vous pouvez admirer en photographie un peu plus bas !!

Les solutions retenues

Nous avons opté pour une solution à base de raspberryPi 3 [source] qui est un micro-ordinateur fonctionnant sous Linux, disposant d’une puissance largement suffisante pour notre application … et coûtant moins de 50€.

 

Compte tenu des différentes contraintes que nous avions, nous avons décomposé notre système en deux parties :

  1. Le boîtier « maître » est placé dans les locaux du Centre de Recherche du Nunavik et a pour rôle de recevoir les données transmises par le boîtier « esclave » puis de les transmettre via Internet vers notre laboratoire ;
  2. Le boîtier « esclave » (qui se trouve dans la serre) effectue les mesures et transmet une fois par jour les informations au « maître »

La transmission maître-esclave se fait par une liaison wifi sur une distance de l’ordre de 300m. Il nous a fallu modifier directement les Rapsberry en y soudant un connecteur pour brancher une antenne externe adaptée (une Yagi pour les connaisseurs). Malgré cette précaution, rien ne permet de s’assurer que la liaison soit toujours établie : le boîtier esclave conserve donc en local les données mesurées jusqu’à ce que le maître lui en confirme la réception.

Chaque boîtier dispose également d’un composant externe qui surveille l’alimentation électrique et qui arrête proprement le système en cas de disparition. Lorsque l’alimentation revient, il est également responsable de redémarrer le système.

Et maintenant ?

Le dispositif est en place depuis le mois de septembre 2017, et il transmet des données… de temps en temps ! Nous avons reçu les données pour quasiment chaque jour, mais souvent bien après la date de la mesure. La bonne nouvelle est que la procédure de synchronisation semble fonctionner (pas « trop » de pertes de données). La moins bonne nouvelle est que pour le moment il faut une intervention humaine pour intervenir régulièrement !

Nous avons cependant beaucoup appris et nous travaillons maintenant sur une nouvelle version permettant de fiabiliser la transmission des données et d’ajouter certaines mesures (notamment la teneur en CO2 à l’intérieur de la serre). Nous devons également travailler sur la mise à disposition des données mesurées via le site web.

Même s’il est perfectible, nous disposons d’un système permettant d’instrumenter une serre horticole (ou autres d’ailleurs) et de récupérer à distance les mesures pour analyses.

Nous espérons pouvoir le partager afin de pouvoir recueillir des informations sur un maximum de serres afin d’alimenter notre travail de recherche sur l’optimisation énergétique des serres horticoles !

N’hésitez donc pas à nous contacter !